Morilhon kabellek
Canard plongeur de taille moyenne (40-47 cm pour une envergure 67-73 cm et un poids variant entre 0,5 et 1 kg), le plumage du mâle et de la femelle sont bien différents.
En plumage nuptial le mâle est tout noir avec des flancs entièrement blancs. Sa tête ronde avec le front vertical a des reflets violet et vert. Elle arbore une huppe composée de longues plumes noires naissant de la calotte et descendant le long de la nuque. Ajoutez un bec court mais large, gris-bleu clair avec une pointe noire et des yeux jaune d’or. En vol, sa barre alaire blanche est bien visible.
En éclipse (plumage arboré par les mâles en période de mue), les flancs sont lavés de brun, mais la huppe reste esquissée.
La femelle adulte est brun foncé terne avec les flancs plus clairs. La base de son bec et le menton sont souvent blanchâtres. Sa nuque comporte un petit décrochement, qui évoque la huppe du mâle.
Le juvénile ressemble à la femelle, mais il a la tête et les parties supérieures d’un brun plus clair avec des plumes aux liserés chamoisés. Les flancs sont barrés de brun chamoisé terne. Les yeux bruns deviennent jaunes au cours du premier hiver.
Le morillon peut vivre jusqu’à 15 ans… si les chasseurs le lui permettent !
C’est une espèce paléarctique, couvrant comme nicheur une grande partie du nord du Paléarctique, depuis l’Islande vers l’est jusqu’au Kamtchatka et vers le sud jusqu’au centre de l’Europe et en Mongolie.
En hiver, on le retrouve dans les zones tempérées du centre et du sud de l’Europe, en Afrique, au Moyen-Orient. Les hivernants vus en Bretagne viennent des Iles Britanniques et des pays situés au nord de la France : Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Scandinavie et de Russie. On observe, généralement, un sex-ratio déséquilibré car les mâles vont souvent moins loin vers le sud que les femelles et les jeunes.
Si les habitats diffèrent légèrement entre la période de nidification et d’hivernage, il affectionne globalement les lacs, les étangs, les réservoirs, les embouchures de rivières, les sablières, les stations d’épuration pourvu que ces milieux soient riches en microfaune benthique et aient une abondante végétation rivulaire et immergée.
Les dénombrements Wetlands montrent que les effectifs nationaux hivernants sont en déclin de 25 % en 10 ans après un pic dans les années 1990.
En 2023, la Bretagne avec ses 1 388 hivernants (1 278 en Bretagne administrative) ne représente que 0,054 % des effectifs totaux dénombrés en France soit 25 781 oiseaux principalement répartis dans le Nord-est de la France.
Son aire de répartition s’étend de manière fragmentée au nord d’une ligne reliant la Charente-Maritime au nord de la Drôme.
La première nidification française de l’espèce a eu lieu en 1952 dans la Dombes et la Bretagne est atteinte en 1972 en baie d’Audierne puis en 1974 au lac de Grand-Lieu. L’atlas des oiseaux nicheurs de Bretagne (enquête 2004-2008) estime la population nicheuse à 22 couples en progression par rapport aux 10 couples recensés entre 1980-1985.
Les couples se forment à la fin de l’hiver et pendant la migration de printemps. Lors des parades, mâle et femelle nagent ensemble tout en trempant le bec dans l’eau de façon répétitive. Une autre parade montre les mâles nageant vite en avant de la femelle tout en étirant leur cou, hochant leur tête d’avant en arrière ou en lissant leurs plumes en arrière de l’aile. L’accouplement a lieu dans l’eau. Ils sont monogames pour une saison.
Le Fuligule morillon est grégaire en dehors de la saison de reproduction formant de grandes troupes surtout en hiver. Il se repose sur l’eau ou près de la rive.
C’est un migrateur voyageant la nuit. La migration d’automne commence en septembre et les sites de reproduction sont vides à fin octobre/novembre. La migration de retour débute vers fin février et dure jusqu’en avril/mi-mai.
Comme tout canard plongeur, il doit courir sur l’eau pour s’envoler. Il a alors un vol rapide et direct avec des battements réguliers.
Il va chercher sa nourriture en plongeant pendant 20 à 30 secondes (et jusqu’à 50), entre 3 et 5 mètres pour consommer des végétaux (racines, graines, bourgeons des plantes aquatiques) constituants l’essentiel de sa nourriture. Mais les mollusques, amphibiens, crustacés, écrevisses, insectes souvent capturés à la surface de l’eau font aussi partie de son régime qui varie en fonction des saisons et des lieux.
Comme le démontrent des études scientifiques, il est un grand amateur de la Moule zébrée Dreissena polymorpha qui peut constituer jusqu’à 80 % du contenu de l’estomac.
Le Fuligule morillon est habituellement silencieux excepté pendant les parades nuptiales.
>> Écouter le cri du Fuligule morillon
Le sex-ratio déséquilibré des groupes d’hivernants est une (ou la) raison pour laquelle la formation des couples débute en mai, même si les parades commencent en janvier.
De mai à juin, il nidifie en couples isolés ou en groupes de nids espacés de 7 à 11 mètres, à une vingtaine de mètres du bord de l’eau dans la végétation épaisse. La femelle construit un support fait d’herbes et de plumes avant d’établir un nid en forme de coupe contenant herbes et laîches avec un fond composé de duvet et de végétation. Elle y dépose 8-10 œufs olive grisâtre, et incube seule pendant 26-28 jours, période choisie par les mâles pour muer.
Les poussins naissent couverts de duvet brun sur le dessus et jaunâtre pâle en dessous. Ils sont emplumés à 45-50 jours après l’éclosion puis élevés par la femelle qui les abandonnera au bout de 30 à 40 jours.
Cette espèce ne produit qu’une seule couvée par saison.
La population reproductrice française est estimée entre 1 500 et 2 000 couples (2009-2012), marquée par une forte augmentation de 1980 à 2012. La dynamique de l’espèce masque cependant l’effondrement de la population de la Dombes (Rhône-Alpes), bastion historique de l’espèce.
En hivernage, la tendance des 12 dernières années (2012-2023) est en baisse de 5 %, et de 2 % pour la tendance à long terme (1980-2023). Le Fuligule morillon est actuellement considéré comme non menacé.
Le Fuligule morillon est classé gibier en France et figure, à l’échelon international, parmi les espèces pouvant être chassées (Directive oiseaux) et dont l’exploitation est possible, même si elle doit être réglementée (Convention de Berne). Pourtant, on le trouve aussi à l’annexe II de la convention de Bonn, qui liste les espèces migratrices se trouvant dans un état de conservation défavorable et nécessitant des mesures de conservation et de gestion appropriée.