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oiseau du mois

Qui est l’oiseau du mois ?

Puffin cendré (Calonectris diomedea)

Puffin cendré – ©J.P Dubois

Infatigables et merveilleux voiliers, les Procellariidés (pétrels et puffins) sont des oiseaux marins de taille petite à grande. Tous possèdent des narines tubulaires à la base du bec. Avec leurs ailes le plus souvent longues et étroites, ils sont profilés pour des déplacements de longue distance en haute mer. Les pattes palmées leur permettent de nager en surface, de plonger, de se reposer en « radeau ». Ils se nourrissent de vertébrés et invertébrés marins et ne viennent à terre que de nuit pour nicher.

Description

Le Puffin cendré est un oiseau marin de taille imposante avec un corps de 45-48 cm et un poids de 400 à 850 grammes, les mâles étant plus lourds que les femelles. Ailes étroites et longues d’une envergure de 100 à 120 cm, gris brun dessus et blanches bordées de brun dessous. Parties supérieures brun clair. Dessous, ventre et poitrine blanchâtres. Bec jaune pâle à rosé tacheté de noir à l’extrémité avec des narines tubulaires à sa base. Sa longévité est de 24 ans

En mer, les sexes ne sont pas reconnaissables, mais le juvénile se différencie de l’adulte à la fin octobre, par un plumage contrasté (et non terne) et complet (mue des rémiges chez l’adulte).

  • Un grand navigateur
    Marin et pélagique, il a un vol nonchalant par temps calme et devient un bolide manœuvrant avec habileté au ras des vagues par vent fort profitant des vents et des mouvements d’air créés par les vagues pour minimiser les efforts et donc les dépenses énergétiques. Leur vol est puissant, aisé et souvent spectaculaire.
  • Les produits de la mer
    Pêcheur de surface, médiocre plongeur et de courte durée, le Puffin cendré se nourrit de poissons, calmars, crustacés pélagiques. Pour profiter en surface des petits poissons, il s’associe aux bancs de thons, d’espadons, aux chalutiers rejetant les déchets de la pêche ou aux palangriers en quête d’un appât monté sur hameçon.

Reproduction : 5 mois pour un petit

Le Puffin cendré ne revient à terre que pour nicher seulement la nuit, de la fin du mois de février (début de l’appariement) à la seconde quinzaine d’octobre (lors de l’envol des jeunes). Nicheur insulaire, il se reproduit aussi bien sur des îlots de petite taille que sur de grandes îles (Malte, Minorque), du niveau de la mer jusqu’à 435 m d’altitude.

Il utilise des substrats variés (îles plates, rocailleuses, falaises), dans des cavités, des boyaux (îlots calcaires), dans des terriers, (qu’il creuse lui-même avec le bec et les pattes) sous la terre, dans la lave, sur des pentes herbeuses…… On le trouve aussi sous le couvert végétal, sous des racines, dans des sites artificiels (trous de murs). Ce mode de nidification hypogée lui assure une protection contre les prédateurs et la chaleur estivale.
Chez cet oiseau colonial, la ponte est synchronisée. Elle intervient en Corse et sur les îlots du littoral méditerranéen entre le 18 mai et le 1er juin comprenant un seul œuf non remplacé en cas d’échec et couvé alternativement par le mâle et la femelle. L’incubation dure environ 52 jours et l’élevage du jeune prend 89 jours. Les jeunes quittent leur nid au milieu du mois d’octobre.

La densité des reproducteurs peut être élevée : jusqu’à 50 nids pour 880 m2 à l’île Lavezzi (Corse du sud) ; 24 nids pour 70 m2 à l’île Zembra (Italie) ou 40 couples utilisant un seul boyau à l’île Linosa (nord de Lampéduza en Italie)

Le poussin est nourri une fois par nuit par un des deux adultes. La fréquence est variable liée à la disponibilité des ressources alimentaires. Cela conduit les jeunes à stocker rapidement des graisses et à dépasser le poids des adultes avant leur envol.

Le succès reproducteur à l’envol dépend des opérations de dératisation. Par exemple, à l’île Lavezzi le nombre de jeunes envolés par œuf pondu variait entre 8% et 70% de 1979 à 2000 ; il s’est élevé à 80%-90% depuis l’opération de dératisation réalisée à l’automne 2000 .
A l’île Selvagem (Océan Atlantique), il a été montré que le succès reproducteur est essentiellement lié à l’âge des adultes et leur expérience de reproducteur . La première reproduction intervient entre 5 et 13 ans (moyenne huit ans à l’île Lavezzi) .  Les partenaires sont fidèles entre eux et à leur site de reproduction.

On a constaté une probable compétition entre les Procellariens pour les sites de reproduction. Quand l’une des espèces est bien représentée, les autres sont absentes ou très minoritaires. Le Puffin cendré semble dédaigner les sites les plus petits. La répartition des sites de reproduction et l’importance numérique des colonies sont aussi dépendantes de la présence de fronts thermiques et de la régularité du vent pendant la période d’élevage des poussins. Les balises satellites posées en 2001-2003 sur les reproducteurs de l’île Lavezzi en Corse montrent que les puffins exploitent surtout les eaux côtières (35 à 80 m de profondeur).

 

 

Concert nocturne

Les colonies de Puffins cendrés sont bruyantes. Les oiseaux vocalisent surtout en début et en fin de nuit, lors de leurs arrivées et de leurs départs. Mâle et femelle possèdent des chants différents. Ils chantent en vol, depuis le nid, au sol ou perché sur un rocher selon leur statut de reproducteur ou de prospecteur. Les oiseaux appariés chantent en duo au nid, avant la ponte et pendant une bonne partie de la reproduction. L’intensité sonore des colonies baisse vers la fin de l’élevage des jeunes,

Migration – Vacances d’hiver : Benguela ou Brésil ?  

Le Puffin cendré se répartit sur 6 zones d’hivernage :  le courant du Benguela et des Agulhas, le courant du Brésil, l’Atlantique Sud-Ouest, le courant des Canaries et l’Atlantique Nord-Ouest

Le courant du Brésil : courant marin chaud se déplaçant vers le sud le long du Brésil jusqu’à l’embouchure du Rio de la Plata en Argentine

Le courant de Benguela est un rapide courant froid océanique qui coule depuis l’Afrique du Sud, remontant les côtes de Namibie et d’Angola vers le nord-nord-ouest pour rejoindre un courant chaud équatorial. Il est alimenté par une remontée d’eau froide des profondeurs le long de la côte Ouest de l’Afrique.

Peu de Puffins cendrés hivernent en Méditerranée. La plupart rejoignent l’Océan Atlantique, rapidement après l’envol des jeunes, en passant par Gibraltar entre mi-août et mi-novembre. La zone d’hivernage des oiseaux de Méditerranée reste mal connue en raison du très petit nombre de reprises d’oiseaux marqués. Les données disponibles suggèrent qu’ils hivernent dans l’Océan Atlantique entre le Nord de l’équateur et 40°S, pénétrant peut-être dans l’Océan Indien.

Les individus des iles macaronésiennes migrent pour une partie au large de l’Afrique du Sud probablement dans le sud-ouest de l’océan Indien. Une autre partie hiverne vers les côtes de l’Amérique du Sud et du Nord.

Les oiseaux retournent en Méditerranée par Gibraltar en février et mars rejoignant leurs sites de reproduction au plus tôt la seconde quinzaine de février.

 

Taille des populations

La population européenne du Puffin cendré a été estimée entre 57 000 et 76 000 couples dans les années1970-1980et a été réévaluée en 2012 entre 142 478 et 222 996 couples à la lumière des recensements menés sur l’ile de Zembra en Tunisie qui héberge 70% des effectifs.

La population française, estimée entre 1044 et 1293 couples dans les années 1990, compte entre 840 et 1220 couples (2009-2011) répartis en Corse (300-400 en Corse du sud et 53 en Haute-Corse) et dans les archipels des îles d’Hyères (180-370 couples), des iles de Marseille (314-385 dont 300 dans l’archipel de Riou)

La population mondiale est estimée dans une fourchette de 504 000 à 507 000 individus sans déclin marqué.

Menaces potentielles

A terre , la principale menace est la prédation des nichées par le Rat noir (Rattus rattus) à la densité d’autant plus élevée que l’île est petite. Trois ans après une dératisation en 2000 sur l’île de Lavazzi (66 ha), l’effectif reproducteur s’est légèrement accru et le succès reproducteur a été nettement amélioré.

En mer, les activités humaines impactent les populations :

  • Les 6 zones d’alimentation du Puffin en hivernage sont aussi celles les plus exploitées par les flottes de pêche avec les captures accidentelles, les noyades etc…
  • L’’utilisation de palangres constitue une menace dont l’impact est inconnu sur les lieux de pêche, de reproduction et d’hivernage dans l’Atlantique. La population des îles Baléares subit aujourd’hui une perte annuelle de 4 à 6% provoquée par la mort d’oiseaux s’attaquant aux appâts des palangres.

Il est possible enfin que les cycles du Niño affectent la survie des oiseaux.

Statut juridique de l’espèce

Espèce protégée en France : annexe I de la Directive Oiseaux et annexe II de la Convention de Berne.

Il est classé en « Préoccupation mineure » par l’UICN et son statut de conservation est considéré comme défavorable suite au déclin de 2% de la population en 3 générations.

Propositions de gestion

L’élimination totale et durable des rats sur les îles est nécessaire pour la conservation des populations à long terme.  L’élimination des rats bénéficie à toute la faune insulaire.

La fréquentation humaine des îles, touristique notamment, en période de reproduction, n’est pas une grande menace pour peu qu’elle soit canalisée à l’écart des nids et que soit réglementée la présence des chiens. La grande majorité des sites de reproduction du Midi et de Corse étant situés dans des espaces protégés doit faciliter la mise en œuvre de ces mesures.

La protection des zones d’alimentation, par la règlementation de certaines pratiques de pêche et par le contrôle des pollutions et des loisirs nautiques atténuerait les nuisances aux puffins dans les secteurs les plus fréquentés tout en bénéficiant à d’autres espèces pélagiques (poissons…).

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