Lorsqu’on observe les différentes silhouettes d’oiseaux qui évoluent dans nos villes, l’une d’entre elles est aisément reconnaissable avec sa queue échancrée et son dos noir contrastant avec son ventre et son croupion blanc : l’Hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum). Posée, ses pattes sont courtes et emplumés de blanc. Il n’y pas de dimorphisme sexuel visible. Plus trapue que les autres hirondelles avec une queue courte et dépourvue de filets, sa gorge et son croupion blanc la distingue de l’hirondelle rustique dont le croupion est noir et la gorge rouge sombre. Sa silhouette et sa façon de voler évoquent plus un Martinet noir miniature.
C’est une espèce rupestre, nichant à l’origine en colonie sous les surplombs rocheux des falaises. Comme la rustique, elle s’est adaptée aux bâtiments et autres constructions comme les ponts, mais continue de nicher localement en sites naturels. Mais, contrairement à l’hirondelle rustique qui niche dans des endroits confinés, elle a besoin d’un accès direct au milieu aérien. C’est la raison pour laquelle, en milieu anthropique, ses nids sont toujours à l’extérieur des bâtiments. Le plus souvent, ce sont les avant-toits, les corniches, les embrasures de fenêtre, qui abritent son nid. Elle est une véritable citadine, à l’inverse de sa cousine la rustique, nettement plus rurale.
Espèce eurasiatique nichant de l’Europe de l’Ouest jusqu’en Sibérie orientale. Les zones d’hivernage se trouvent quant à elles en Afrique sub-saharienne, péninsule arabique et dans le sud-est asiatique.
C’est une migratrice transsaharienne. Allant globalement plus loin en hiver que la rustique, elle revient naturellement un peu plus tard qu’elle de migration. Dans la seconde décade d’avril et surtout en mai arrivent les premiers contingents importants en Europe occidentale. Le départ en migration postnuptiale est tardif intervenant en moyenne vers la mi-septembre et il n’est pas rare de trouver encore des individus début octobre.
Le cri habituel est un “prrri” roulé de tonalité basse, très caractéristique et fréquent permettant de la déterminer avant de la voir. Le chant, émis près du nid, est un babil prolongé qui n’est pas sans rappeler celui de l’Hirondelle rustique, mais en moins sonore.
Elle présente une plus grande adaptation au milieu aérien que la rustique. Elle se nourrit du plancton aérien, c’est à dire la petite entomofaune volante qui occupe l’espace aérien jusqu’à plus de 50 mètres de hauteur. Ainsi on la voit souvent évoluer assez haut dans le ciel, chassant aussi bien au-dessus de la ville que de la forêt, d’un plan d’eau ou de la campagne agricole. Elle n’a pas la contrainte de la rustique qui chasse plutôt en milieu ouvert des insectes plus gros et plus près du sol. De ce point de vue, elle est plus proche du Martinet noir par exemple. On la soupçonne même de pratiquer en hivernage le vol permanent à la façon des martinets, les oiseaux se reposant tout en continuant à voler.
L’Hirondelle de fenêtre est cavernicole et construit elle-même un nid, en forme d’un demi-hémisphère. La condition est que le nid ait une protection supérieure. L’accès se fait par un orifice adapté à la taille de l’oiseau et situé dans la partie haute. Son exiguïté facilite la défense du domicile et a pour but d’empêcher d’autres passereaux de s’y introduire. Le nid est maçonné par les adultes avec des boulettes de boue prélevées au bord de l’eau et mélangées à de la salive, donnant ainsi un ciment qui ne se craquèle pas au séchage. La femelle donne au nid sa forme et sa consistance et le garnit de fibres végétales et d’une grande quantité de plumes. Le nid est pérenne et peut être réoccupé de nombreuses années. La ponte de 3 à 5 œufs blancs couvés par les deux parents pendant 14 jours a lieu à partir de début mai. Les poussins restent au nid pendant trois semaines et les parents les aident jusqu’à l’émancipation complète.
C’est une espèce grégaire et sociable, nichant en colonies souvent conséquentes. Le caractère sociable peut se juger à la proximité des nids qui sont contigus pouvant même se chevaucher, et aussi au regroupement des individus dans les nids pour la nuit, prouvant la résistance du matériau. On a compté que jusqu’à 13 hirondelles de taille adulte peuvent passer la nuit regroupées dans un seul nid.
Elle n’est pas globalement menacée, mais connaît un déclin certain en Europe de l’Ouest depuis la seconde moitié du XXe siècle et s’accélérant au début du XXIe siècle.
Trois grands types de facteurs négatifs peuvent être invoqués pour expliquer cette raréfaction :
• La diminution des ressources alimentaires en période de reproduction due à la diminution globale de l’entomofaune volante suite à l’utilisation massive des pesticides et aux changements du climat.
• Une dégradation des conditions de migration et d’hivernage en Afrique à cause des aléas climatiques sur les voies de migration et dans les zones d’hivernage (sécheresses, désertification…).
• La disparition des sites de nidification possibles en ville. Les enduits et peintures modernes ne permettent plus aux nids d’accrocher sur les murs. La boue pour construire les nids devient introuvable dans nos villes aseptisées. Surtout l’élevage des jeunes pouvant produire des salissures à l’aplomb du nid, les nids font de plus en plus souvent l’objet de destructions bien que cela soit strictement interdit, étant donnée la protection légale dont jouit l’espèce.